dimanche 10 novembre 2013

Prostitution: faut-il pénaliser les clients? La prostitution doit elle être interdite?

La prostitution est une question de société, aussi importante et incontournable que l'est la réflexion sur la dépénalisation du cannabis ou l'acceptation et la légalisation du mariage pour tous.

On se pose maintenant la question de savoir si il faut pénaliser les clients qui ont recours à la prostitution? Mais où va-t-on ? Que font les Europeos, les socialistes, les gens qui pensent, les sociologues, les politiques ?

De vrais questions se posent, il faut y répondre et arrêter d’être hypocrite: La prostitution est-elle forcément une condition subie et dégradante? Faut-il l'abolir ou, au contraire, l'autoriser pour mieux l'encadrer?

Je souhaite vous donner mon avis et vous invite à réfléchir, ensuite, sur le sujet en lisant un excellent article de Nathalie Heinich, sociologue, publié par le monde le 8 novembre 2013.

Pour ma part je ne crois pas aux interdictions puritaines qui s’appuient sur des réflexions du type « la sexualité sans âme, sans considération de la personne, est à l’antipode de l’idéal de liberté » (Dominique Simmonet, journaliste - écrivain) ou « la prostitution dans la société d’aujourd’hui est une réalité violente et injuste, inhumaine et criminelle. Une réalité inacceptable dans la République» (Tribune signée, entre autre, par Roselyne Bachelot, Marie-George Buffet, Dominique Voynet).

Je ne crois pas à l’abolition de la prostitution et je n’y suis pas favorable. « L’urgence est d’abord de mettre fin à l’esclavage de la prostitution lorsqu’elle est imposée par des réseaux mafieux ». Mais l’abolition est une aberration, un non sens. Des personnes ont choisi librement la prostitution (hommes, femmes, hétérosexuels et/ou homosexuels) Demandons aux prostitués/ées ce qu’ils /elles pensent ? Individuellement, sans contrainte et sans apriori . Certains/es font le choix de ce métier et ne souhaitent pas en changer. Ils/elles en ont le droit. C’est aussi ça la liberté. Parce qu’il y a des trafiquants de voitures volées nous allons interdire les voitures ? Parce qu’il y a de la contrebande d’alcool aux frontières nous allons interdire les boissons alcoolisées? Parce qu’il y a des financiers mal intentionnés, allons nous interdire les banques?

Pénaliser les clients de prostitués est absurde. Il sera impossible d’appliquer la loi. Allons nous poursuivre les clients chez eux et dans les hôtels ? La prostitution volontaire et choisie n’aura d’autre option que la clandestinité. Les systèmes mafieux seront renforcés.

Il faut autoriser et contrôler la prostitution.

A vous de réfléchir!!!


Lire, ci-dessous, l'article de Nathalie Heinich (sociologue)


Une loi culpabilisante - Contre le féminisme puritain 

Tel un serpent de mer, le projet de pénalisation des clients de la prostitution vient de resurgir, à l'initiative de députés du Parti socialiste. Mû par une excellente intention - faire respecter la dignité des êtres humains, et des femmes en particulier - mais porté par des arguments inconsistants, ce projet risque fort, s'il est adopté, d'engendrer des effets opposés à ses objectifs, illustrant une fois de plus les fourvoiements d'un certain angélisme que cultive une partie de la gauche. 

Commençons par l'argument de la dignité : peut-il être légitimement opposé à la défense des libertés individuelles, notamment en matière d'exercice de la sexualité ? En l'état actuel, la loi respecte la liberté sexuelle à condition qu'elle s'exerce entre adultes consentants. La prostitution des mineurs étant déjà pénalisée, reste la question du consentement. Les défenseurs de ce projet arguent que les personnes qui se prostituent ne le font de leur plein gré qu'apparemment, y étant le plus souvent poussées par la nécessité économique ou par des traumatismes psychiques. Mais l'argument de la nécessité économique ne tient pas, ou alors il faudrait interdire toute activité rémunérée pour des raisons strictement alimentaires. Reste l'argument du traumatisme psychique, qui entraverait inconsciemment le libre arbitre en matière de sexualité. Voilà qui suppose une hypothèse lourde, à savoir qu'il faudrait protéger les prostitué(e)s contre eux (elles)-mêmes, en s'appuyant non sur l'expression de leur volonté, mais sur l'état présumé de leur inconscient. A quand donc une police d'investigation psychanalytique? Quand les défenseurs autodéclarés des prostitué(e)s daigneront-ils écouter leurs revendications, totalement opposées à une telle mesure? Continuons avec l'argument de la jurisprudence, qui pousserait à aligner la question de la prostitution sur des mesures déjà votées en matière de protection de la dignité humaine: la jurisprudence concernant le lancer de nains (spectacle qui a été interdit alors qu'il se faisait avec l'accord des intéressés), et la jurisprudence concernant le port de la burqa. Or, aucun de ces deux cas ne peut servir de fondement à une pénalisation de la prostitution, parce qu'ils concernent exclusivement l'espace public: ce qui est jugé attentatoire à la dignité dans le cas des nains, c'est la mise en spectacle (mais, dans l'intimité, ils peuvent faire ou se faire faire ce qu'ils veulent); et dans le cas des femmes au visage dissimulé, c'est la privation du statut de citoyen à part entière dans l'espace public (mais, à la maison, elles portent la tenue qu'elles veulent). En revanche, la prostitution n'a pas vocation à s'exercer en public - au contraire. Elle ne concerne donc que deux adultes a priori consentants. Exit l'argument de la dignité, sauf à interdire aussi les pratiques sadomasochistes. A quand donc une police d'investigation en chambre ?Reste l'argument de la marchandisation du corps humain comme atteinte à la dignité, commun aux partisans de la pénalisation de la prostitution et aux opposants à la gestation pour autrui (mères porteuses). Là encore, il y a tension entre deux valeurs fondamentales : la dignité, qui concerne le bien public, et la liberté individuelle, qui ne concerne que les personnes impliquées. Or la question de la marchandisation du service sexuel dans le cadre de la prostitution n'est pas assimilable à la question de la marchandisation du service procréatif dans le cadre de la GPA, parce que cette dernière ne concerne pas que la mère porteuse et les parents adoptifs : elle concerne aussi l'enfant ainsi fabriqué, et les enfants de la mère porteuse, si elle en a.Le bon sens autant que les avis des spécialistes de la petite enfance incitent à considérer que ce ne sont pas là des entités inexistantes, mais des êtres vivants, dotés d'affects et donc susceptibles d'être affectés - sans doute profondément - par l'abandon. Or rien de tel dans la prostitution : être opposé à la GPA n'implique donc pas de militer aussi pour l'interdiction de la prostitution. 
Que reste-t-il, dès lors, à l'appui de ce projet ? Rien d'autre que la force de l'éthique de conviction qui anime leurs porteurs. Mais, en politique, la sagesse incite à faire prévaloir l'éthique de responsabilité sur l'éthique de conviction; et, en l'occurrence, à écouter la voix des spécialistes, qui expliquent à quel point un cran supplémentaire dans la clandestinité exposerait les plus faibles parmi les prostitué(e)s à encore plus de vulnérabilité. 
S'il était adopté, ce projet de loi irait donc contre ses propres intentions, oubliant que l'urgence est d'abord de mettre fin à l'esclavagisme de la prostitution lorsqu'elle est imposée par des réseaux mafieux. 
Invitée en 2004 à un colloque du Parti socialiste sur " L'avenir de la France ", j'y avais proposé, afin de mettre un terme aux conditions indignes d'exercice de la prostitution, l'autorisation des bordels à condition qu'ils soient réglementés, autogérés, bien chauffés et... mixtes (égalité oblige). Ma proposition avait alors été ovationnée par une nombreuse assemblée de militants. Le Parti socialiste a-t-il donc à ce point changé en moins de dix ans? Je ne le crois pas : simplement, comme toujours, les tendances les plus radicales, comme c'est le cas, aujourd'hui, de la tendance la plus puritaine du féminisme, y parlent toujours le plus fort, et avec elles le risque du fourvoiement dans des mesures au mieux inutiles, au pire contre-productives. Espérons que les députés auront, cette fois, le bon sens d'y résister.


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